lundi 17 septembre 2018

20. FŒTUS VENUS. MOINS 1 MOIS

Le liquide amniotique prend un goût amer. Que se passet-il ?

- He ho ! le jumeau ! Il y a un problème. Tu dors ? Le jumeau met du temps à répondre.

   - C'est seulement que je me sens fatigué, tellement fatigué... J'ai l'impression de me vider de l'intérieur.
   J'essaie de comprendre ce qu'il se passe car, pour ma part, je suis en train de m'enrichir d'une nourriture délicieuse. Une liqueur pleine d'intelligence, de sucre et de gentillesse. Je sursaute :

- Je suis en train de me gaver de ton énergie !

- C'est donc ça, murmure-t-il. Je connais ce phénomène. Il s'exprime avec difficulté.

   - Nous sommes des jumeaux transfuseur-transfusé. Je le sais car, dans ma vie précédente, j'ai été accoucheur obstétricien. Il m'en reste quelques souvenirs.

- Explique.

   - Eh bien, nous avons créé une connexion entre nous, un petit vaisseau dérivatif qui nous relie directement, indépendamment des organes de notre mère. Ce n'est qu'une petite veine mais elle est suffisamment large pour nous permettre de pratiquer des échanges liquides entre nous. C'est pour cela que nous nous entendons si bien. Mais c'est aussi pour cela que l'un de nous deux, toi en l'occurrence, ne peut s'empêcher de pomper l'autre. À moins que l'on nous sorte d'ici dans les jours qui viennent, tu m'auras bientôt complètement aspiré.
Je frissonne.

- Et... ?

- Et je mourrai.

Il se tait, épuisé, mais j'insiste.

- Ils sont au courant, là-bas dehors ?

Il lui faut quelques instants pour répondre.
   - Ils savent probablement qu'il y a des jumeaux, mais ils ignorent que tu es en train de m'aspirer. Ils nous ont d'ailleurs déjà donné des prénoms hier, à tous les deux. Tu dormais, mais moi j'ai tout entendu. Tu t'appelles Venus et moi George. Bonjour, Venus !

- Heu... bonjour, George !

Affolée, j'entreprends de tambouriner.

- Eh là-haut, dehors, faites quelque chose ! Déclenchez l'accouchement.
George est en train de mourir !

Je trépigne de plus belle. Il me calme.

   - Laisse, c'est trop tard. Je continuerai à vivre à travers toi. Je serai toujours là, en toi, ma Venus.

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