mercredi 19 septembre 2018

197. VENUS. 35 ANS


   J'ai entendu le docteur dire qu'on ne pouvait plus rien pour moi. Des morceaux de tôle se sont enfoncés dans mes organes vitaux. Je vais bientôt mourir.
   J'ai reçu les débris du pare-brise en pleine figure. Je suis née belle et je meurs défigurée. J'ai souhaité un jour qu'une rivale connaisse pareil sort. Ça m'est arrivé à mon tour. Quelle ironie ! Peut-être que tout le mal que nous souhaitons aux autres est comptabilisé quelque part et nous revient plus tard en boomerang.
   Étrange qu'à l'heure de mon dernier souffle je songe au mal que j'ai souhaité à Cynthia Cornwell, la rivale que j'avais oubliée.
   C'est la fin. Je m'étais imaginé qu'on pouvait vivre à l'abri des dangers, mais on n'est à l'abri nulle part. Même en conduisant prudemment, dans une voiture sûre, dans un pays démocratique, avec une ceinture de sécurité, avec un mari protecteur, avec tous les progrès de la médecine, de la technologie, de l'humanité, on n'est nulle part en sécurité totale.
Aurait-il fallu qu'avec Raymond nous ne partions jamais en vacances ?
Aurions-nous dû demeurer paisiblement enfermés chez nous ?
Raymond.
   J'ai réussi au moins ça : mon couple. Je sais que je vais mourir. En cet ultime instant, je sens la foi m'envahir. Faut-il être proche de la mort pour croire en Dieu ? Il me semble que oui. Je croyais aux anges quand je n'avais que de petits tracas, je crois en Dieu quand surviennent les gros ennuis.

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